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Conversation avec Alexandra Roulet, Professeure d’économie à l’INSEAD

parPierre Rousseaux
24 avril 2024
dans Interviews
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@ François Bouchon / Le Figaro

@ François Bouchon / Le Figaro

AUTEUR            Pierre Rousseaux
FORMAT            Interviews
DATE                  24 avril 2024
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Alexandra Roulet est Professeure d’économie à l’INSEAD, chercheure affiliée au CEPR et a exercé les fonctions de conseillère économique du Président de la République et de la Première Ministre de juin 2022 à septembre 2023. Dans cette interview nous discutons des résultats de sa recherche en économie du travail, axée d’une part sur les inégalités salariales femmes-hommes et d’autre part sur les comportements de recherche d’emploi et l’assurance chômage.
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Pierre Rousseaux – Pourquoi s’être intéressée à l’économie du travail et en particulier l’analyse des inégalités de genre sur le marché du travail ? En quoi cette thématique est-elle importante pour l’économie ?
ALEXANDRA ROULET – J’ai débuté ma thèse en m’orientant naturellement vers l’économie du travail. Cela s’explique, d’une part, par le problème persistant du chômage en France, un sujet d’interrogation majeur pour les économistes français. D’autre part, lors de ma thèse à Harvard, aux États-Unis, j’ai suivi les cours de Larry Katz, professeur d’économie du travail, ce qui a grandement influencé mon choix de poursuivre dans ce domaine. Ainsi, j’ai principalement travaillé sur l’économie du travail, tout en ayant un intérêt marqué pour l’économie publique.
Au cours de ma thèse, mes recherches se sont d’abord concentrées sur l’économie du travail en général, sans aborder spécifiquement les inégalités entre hommes et femmes. J’ai étudié divers aspects tels que les effets de l’assurance chômage, les coûts en termes de santé mentale liés à la perte d’emploi, etc. Ce n’est qu’après la fin de ma thèse que je me suis intéressée aux inégalités femmes-hommes. Cela coïncide d’ailleurs plus ou moins avec la naissance de mon premier enfant, une période où les femmes font souvent l’expérience d’un coup de frein dans leur carrière. C’est en tous cas vers ce moment-là que je me suis penchée sur cette question, en collaboration avec Roland Rathelot et Thomas Le Barbanchon.
Nous nous sommes intéressés aux critères de recherche d’emploi. Nous avons constaté une forte hétérogénéité en ce qui concerne le temps de trajet que les hommes et les femmes sont prêts à accepter pour un emploi donné. Des hommes et des femmes similaires en termes d’éducation, de métier, de zone d’emploi, etc., ne valorisent pas de la même manière les aspects non-salariaux d’un emploi, appelés “non-wage amenities”. Les femmes accordent davantage d’importance à ces dimensions, et notamment au temps de trajet domicile-travail. En d’autres termes, pour des hommes et des femmes comparables, les femmes sont davantage prêtes à accepter un salaire légèrement inférieur en échange d’un temps de trajet plus court.
Cette différence dans la valorisation des “non-wage amenities” contribue aux inégalités salariales femmes-hommes. L’écart salarial résiduel de 5% actuellement observé en France pour des hommes et des femmes travaillant dans les mêmes entreprises et métiers, peut en partie s’expliquer par le fait que les femmes occupent des emplois ayant des caractéristiques non salariales plus favorables, comme un temps de trajet plus court ou des horaires plus flexibles (ce dernier aspect étant exploré par d’autres recherches en dehors du cadre de nos propres travaux).
C’est un résultat important qui souligne donc que les femmes sont disposées à rogner une partie de leur salaire pour mieux répondre à des attentes non salariales. Ces choix résultent-ils de choix personnels délibérés ou de l’existence de contraintes (enfants à charges, etc.) ? 
La question centrale réside en effet dans l’origine de cette disparité, et ce que nous pouvons affirmer jusqu’à présent, c’est qu’elle émane de l’offre de travail plutôt que de la demande de travail. En d’autres termes, cela ne résulte pas de pratiques discriminatoires des employeurs à l’encontre des femmes résidant loin de leur lieu de travail. Bien qu’il puisse y avoir des comportements sexistes de la part des employeurs, dans le contexte de l’arbitrage entre salaire et temps de trajet que nous documentons, la disparité provient réellement des choix faits par les hommes et les femmes. Cependant, ce que nous ne sommes pas en mesure de dire, faute de données et d’identification adéquate, c’est si ces choix résultent principalement de différences de préférences ou de différences de contraintes.
Ces deux options n’ont pas les mêmes implications. Si la disparité résulte de différences de préférences, alors il n’y a pas nécessité d’intervenir pour changer les choses. En revanche, si la disparité est due à des contraintes différentes, on a envie d’explorer les moyens de relâcher ces contraintes. Déterminer si ces différences relèvent des préférences individuelles ou des contraintes genrées est une question complexe, souvent abordée par des disciplines telles que la sociologie. Personnellement, je suis encline à considérer que même les préférences sont en partie socialement construites, ce qui peut compliquer la distinction entre contraintes et préférences. 
Vos recherches étudient également les choix des entreprises pour lesquelles les demandeurs d’emploi travaillent. Ces choix sont-ils les mêmes entre les femmes et les hommes ? 
Ces recherches, menées en collaboration avec Marco Palladino et Mark Stabile, mettent en lumière les différences entre les hommes et les femmes dans le choix des entreprises pour lesquelles ils travaillent. En économie du travail, on observe souvent ce qu’on appelle des ”effets fixes entreprises”, qui traduisent le fait que certaines entreprises, toutes choses égales par ailleurs, paient davantage, en raison de rentes plus élevées, d’une plus grande productivité, etc. Ces entreprises sont qualifiées d’ “entreprises à effet fixe élevé”, et les hommes ont tendance à être plus représentés dans ces entreprises que les femmes, ce qui contribue aux inégalités salariales femmes-hommes…  
Dans notre recherche en cours avec Marco Palladino et Mark Stabile, nous nous sommes penchés sur l’évolution temporelle du type d’entreprises dans lesquelles travaillent les hommes et les femmes. Au fil du temps, on observe une convergence, qui explique environ 20% de la réduction des inégalités entre les hommes et les femmes en France de 2000 à 2020. Si l’on considère les inégalités de salaire homme-femme en équivalent temps plein, sans contrôler du métier, etc., elles sont passées d’environ 18% au début des années 2000 à 13% en 2018, lorsque nos données s’arrêtent, soit une diminution d’environ 5 points de pourcentage. Sur ces 5 points, environ 1 point de pourcentage peut être attribué au rapprochement entre la moyenne des “effets fixes” des entreprises où les hommes sont salariés  et  la moyenne des “effets fixes” des entreprises où les femmes travaillent. 
Vous avez également étudié l’impact de l’assurance chômage sur la durée passée au chômage, un sujet abondamment traité dans la littérature (et très actuel), quels en sont les résultats ?
En effet, avec Thomas Le Barbanchon et Roland Rathelot, nous avons examiné deux types de variations dans l’assurance chômage à laquelle les demandeurs d’emploi français étaient éligibles. La première est celle de la réforme de 2009, qui avait pour objectif de rendre le système plus transparent et équitable. Elle a instauré un système linéaire où la durée d’indemnisation potentielle dépend de manière linéaire de la durée travaillée passée, alors que le système précédent était en escalier avec seulement trois durées d’indemnisation potentielles possibles. Nous avons également exploité le fait que les seniors, (à l’époque il s’agissait des plus de 50 ans, aujourd’hui le seuil a été décalé de plusieurs années), bénéficient d’une indemnisation plus généreuse et plus longue que les non-seniors. Nous avons utilisé ces deux sources de variation dans la durée de l’indemnisation pour identifier les effets de l’assurance chômage sur la durée du chômage.
Nous avons trouvé des élasticités comparables à celles estimées dans d’autres pays, peut-être un peu plus fortes. Cependant, notre contribution consiste à examiner également le type d’emploi recherché. Nous avons constaté qu’une assurance chômage plus longue allongeait la durée du chômage, mais n’avait aucun effet significatif sur les critères de recherche d’emploi des demandeurs d’emplois concernés: ces critères semblent essentiellement déterminés par leurs emplois passés.
Ce résultat est notable, car selon la théorie économique, on s’attendrait à ce que la générosité de l’assurance chômage impacte le salaire de réserve, c’est-à-dire le salaire minimum jugé acceptable par les demandeurs d’emploi. L’absence de réaction du salaire de réserve aux variations de la durée d’indemnisation suggère que, dans le contexte français analysé dans cette étude (c’est-à-dire avant les réformes des deux quinquennats d’Emmanuel Macron), une durée d’assurance chômage plus longue générait des coûts en termes d’aléa moral, prolongeant le chômage, sans améliorer la qualité des emplois..
Pendant votre thèse, vous avez étudié une autre dimension de l’impact de l’assurance chômage sur les demandeurs d’emploi, à savoir l’impact sur leur bien-être. 
​​En réalité, l’objectif était d’explorer le coût non monétaire du chômage. On sait que le chômage peut avoir des répercussions au-delà du simple aspect financier, par exemple, certains pays ont observé une augmentation du risque de décès chez les personnes licenciées. Cependant, ces études sont souvent complexes à interpréter car le choc du licenciement est associé à plusieurs perturbations, telles que la perte de revenus, de la couverture santé, etc. J’ai donc étudié le contexte danois, où l’assurance chômage couvre environ 90% du salaire passé et où la perte de revenu net lors d’un licenciement est d’environ seulement 6%, ce qui permet ainsi d’isoler la composante non monétaire du choc. Autrement dit, je voulais mettre en évidence  un coût psychologique du chômage malgré un revenu quasi constant.
Cependant, les résultats que j’ai obtenus ne vont pas dans ce sens. Mon analyse révèle que la perte d’emploi au Danemark ne s’accompagne pas de coûts importants en termes de santé mentale, mesurée par des indicateurs tels que la consommation d’antidépresseurs ou d’opioïdes. Il n’y a pas non plus de coût significatif en termes de santé physique. Ces conclusions suggèrent que lorsque les individus sont bien assurés contre le risque de chômage, avec une assurance revenu généreuse et la préservation de la couverture santé, les coûts psychologiques du chômage ne sont pas aussi prononcés qu’on pourrait le craindre. En somme, cette constatation peut être interprétée de manière optimiste, indiquant que des politiques publiques peuvent atténuer les effets psychologiques du chômage en assurant une protection adéquate.
Pour cela, aviez-vous utilisé des données de pharmacie liées aux demandeurs d’emploi Danois ? 
Oui, exactement. Il est également crucial de reconnaître la validité externe de ces résultats. Le coût psychologique du chômage semble être étroitement lié aux politiques publiques et aux protections sociales en place. Le fait que je n’ai pas trouvé un tel coût au Danemark ne signifie pas du tout qu’il n’existe pas dans d’autres pays ayant un autre contexte institutionnel et d’autres politiques publiques…
Il est également important de considérer les facteurs conjoncturels qui peuvent influencer ces résultats. L’étude a été menée sur la première partie des années 2000 au Danemark, et les effets observés pourraient être en partie attribuables à la conjoncture économique de cette période. Dans un contexte où il est relativement facile pour les individus de retrouver un emploi, les effets psychologiques du chômage sont sûrement moins prononcés. 
L’assurance chômage comporte finalement différents leviers relatifs à divers objectifs, celui de la durée d’indemnisation pour minimiser l’aléa moral ou celui du taux de remplacement pour maintenir la liquidité du demandeur d’emploi comme sa santé mentale. 
Il est crucial de reconnaître que les individus ont des frais fixes liés à leurs revenus, tels que le loyer et les dépenses pour les enfants déjà engagées. Un taux de remplacement trop faible peut mettre les gens en grande difficulté. Par conséquent, je considère que maintenir un taux de remplacement adéquat est une priorité importante.
En ce qui concerne la durée d’indemnisation, je pense que la réforme entrée en vigueur début 2023 qui a réduit de 25% la durée d’indemnisation était pertinente, du fait des élasticités de la durée de chômage à la durée d’indemnisation déjà mentionnées et du fait du contexte économique de l’époque, marqué par des tensions sur le marché du travail et beaucoup d’offre d’emplois disponibles. 
Il faut noter également qu’il existe d’autres paramètres de l’assurance chômage: les conditions d’éligibilité, les délais de carence, les modalités de rechargement des droits, etc.
Sujets Assurance chômagechômageSanté
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Pierre Rousseaux

Pierre Rousseaux

Président cofondateur et rédacteur en chef d'Oeconomicus; Doctorant au CREST (École Polytechnique, ENSAE) et économiste à l'Institut des Politiques Publiques (IPP)

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