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Recension : “La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique” de Guillaume Pitron

Guillaume Pitron nous propose un voyage dans la mine à la découverte des métaux rares, enjeu climatique, industriel et géopolitique majeur du XXIème siècle.

parThibault Briera
16 avril 2021
dans Environnement, Perspectives économiques
9 minutes de lecture
0
Recension : “La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique” de Guillaume Pitron

Dans son ouvrage La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique, Guillaume Pitron partage une enquête passionnante sur les dessous de l’industrie des métaux et terres rares. Ces métaux disséminés dans la croûte terrestre sont indispensables aux technologies d’aujourd’hui et de demain. Ils pourraient jouer un rôle économique, industriel et géopolitique majeur dans la transition énergétique et numérique à l’œuvre.

Résumé

  • Dans son ouvrage “La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique”, Guillaume Pitron nous dévoile la part d’ombre des “green tech” censées assurer à l’humanité un avenir numérique et écologique
  • Pour fonctionner, les technologies numériques et celles produisant de l’électricité renouvelable s’appuient sur divers métaux rares, dont les fameuses terres rares.
  • L’extraction et le raffinage de ces métaux génère une pollution environnementale importante, pollution passée sous silence car la production a largement été localisée dans des pays du Sud, notamment la Chine.
  • Ayant remonté la filière des terres rares, la Chine dispose aujourd’hui d’un avantage technologique et stratégique majeur. En clair, elle serait aux terres rares ce que l’OPEP est au pétrole: un maillon indispensable dans l’approvisionnement d’une ressource essentielle
  • L’ouvrage plaide ainsi pour une réflexion sur nos modes de consommation, la nécessaire sobriété qui guette les pays du Nord.
  • Il s’agit aussi de penser la relocalisation des chaînes de productions, y compris les plus sales: mieux vaut accueillir des industries polluantes sur notre sol pour mieux les encadrer et limiter leur impact environnemental que de fermer les yeux sur les conditions de production ailleurs dans le monde

Article

Selon les prophètes du XXIème siècle, le monde à venir sera largement dématérialisé, consacrant une économie de services fondée sur le numérique (1). Les nouvelles technologies permettront des économies d’énergie substantielles, en optimisant la production et l’usage de l’électricité fournie par des sources renouvelables. Les “green tech”, produits de la conjonction entre l’électricité propre issue des énergies renouvelables et les technologies numériques, ouvriront la voie à une nouvelle ère de prospérité mondiale tout en diminuant l’empreinte de l’Homme sur son environnement.

La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique (édition Les Liens qui Libèrent, 2019) de Guillaume Pitron bat en brèche l’idée d’un avenir plus respectueux de l’environnement et qui ne remet pas en cause nos façons de consommer, de se déplacer, d’échanger.

La matérialité des énergies renouvelables et des technologies du numérique

Avant de plonger au cœur de la mine, G. Pitron rappelle que ni les énergies renouvelables ni les technologies numériques ne sont “dématérialisées”. Le terme d’énergie “propre” est à ce propos totalement mensonger et trompeur. Ces énergies sont néanmoins “décarbonées” au sens où elles émettent sur toute une vie beaucoup moins de CO2 que les énergies fossiles. Selon l’Agence Internationale des Énergies Renouvelables, pour construire un champ d’éolienne d’une puissance de 50 MW – soit environ 10 fois moins qu’une centrale à charbon, 20 fois moins qu’une centrale nucléaire – il fallait employer 22 000 tonnes de béton (concrete), 6 000 d’acier et de fer (steel and iron) (2).

Graphique: Matériaux nécessaires (en tonnes) à la construction d’un champ éolien onshore d’une puissance de 50MW. Source: IRENA

Exploiter une source d’énergie inépuisable à l’échelle des temps humain comme le rayonnement solaire ou le vent ne signifie pas que le déploiement de ces technologies réduise drastiquement l’empreinte de l’homme sur monde qui l’entoure. Il en va de même des technologies numériques, pourtant à première vue immatérielles. Pour s’en convaincre, on s’en tiendra à l’exemple fourni par G. Pitron (p. 80), extrait de l’ouvrage de Flipo, Daubré et Michot La face cachée du numérique. l’impact environnemental des nouvelles technologies : “La seule fabrication d’une puce de deux grammes implique le rejet de deux kilogrammes de matériaux environ” (3). Une fois avérée la matérialité des énergies renouvelables et des technologies du numérique, reste à introduire dans l’équation les métaux rares.

Les métaux rares, pierre angulaire de la transition énergétique et numérique

L’appellation “métaux rares” recouvre un ensemble de métaux d’abondance moyenne et/ou de disponibilité faible dans la croûte terrestre. On y range par exemple l’antimoine, le magnésium ou le cobalt. Les “terres rares” constituent une sous-catégorie dans les métaux rares, agrégeant une vingtaine de métaux aux propriétés électromagnétiques fabuleuses et aux noms énigmatiques: néodyme, prométhium, yttrium etc. Ces métaux sont pourtant indispensables à la transition énergétique et numérique. On trouve entre 9 et 11 kg de terres rares dans les voitures électriques et hybrides selon G. Pitron (p. 295), deux fois plus que dans une voiture essence. Sans métaux rares, impossible de faire fonctionner un smartphone : batteries, écrans, circuits imprimés incluent des métaux rares, même en faible quantité. Il en va de même pour les technologies renouvelables. Les éoliennes se composent d’aimants dont certains sont fabriqués à partir de néodyme, une terre rare ; les cellules photovoltaïques conçues à partir de silicium, un métal rare. En somme, les technologies de demain dépendent largement des approvisionnements en métaux rares. Par chance, ces métaux et ces “terres” n’ont finalement de rare que le nom, on les trouve en quantité dans le sol en excavant suffisamment de roche aux bons endroits. On arrive alors au cœur de l’argumentation du livre de G. Pitron : l’extraction et le raffinage de ces métaux rares indispensables à la transition vers des énergies “vertes” n’a rien de “propre”, au contraire. Les pays occidentaux ont ainsi délégué ces activités polluantes à la Chine, qui en a profité pour s’accaparer de nombreux marchés de métaux rares.

Cachez cette pollution que je ne saurai voir : comment l’Occident a délocalisé les industries minières polluantes en Chine

Bien que ces métaux soient présents en quantité dans le sol, leur extraction nécessite de broyer une quantité impressionnante de roche, une activité gourmande en énergie souvent produite par des technologies fossiles. Il faut généralement séparer chimiquement les métaux rares de la croûte terrestre, processus qui consomme également de grandes quantités d’eau. En outre, les terres rares sont naturellement mêlées à des éléments radioactifs dans le sol comme le thorium et l’uranium. La production de terres rares génère donc des sous-produits radioactifs en faible quantité, comme le radon. En somme, il faut beaucoup d’énergie, d’eau et de produits chimiques pour produire des métaux rares. Il est donc également nécessaire de traiter tous les rejets de l’industrie minière et du raffinage des terres rares, notamment des métaux lourds dont les fuites occasionnent de graves problèmes de pollution locale.

La pollution liée aux énergies renouvelables et aux technologies numériques nous est devenue largement invisible. En cause : les activités d’extraction et de raffinage ont été délocalisées dans des pays aux normes environnementales plus lâches. G. Pitron révèle que la France fut un temps un producteur majeur de terres rares, par le biais de l’usine Rhône-Poulenc de La Rochelle. Les activités les plus polluantes ont notamment été sous-traitées à des entreprises chinoises plus compétitives. Pour cause, la délocalisation s’accompagne alors d’une absence totale de contrôle sur les procédés de production et de retraitement des déchets. Jean-Yves Dumousseau, directeur commercial chez le chimiste américain Cytec et interrogé par G. Pitron témoigne (p. 114-115) raconte: “Les unités de séparation sans contrôle ni procédures de sécurité. Dans les usines de raffinage, les types faisaient de l’électrolyse à sept cent degrés sans casque, en tongs et en short!”. Les témoignages du désastre environnemental et sanitaire en cours affluent en provenance de Baotou, ville chinoise de Mongolie intérieure, consacrée “Silicon Valley des terres rares”. Les mines sauvages y fleurissent, l’extraction des terres rares se faisant au mépris de toutes les normes environnementales (4).

Une dépendance stratégique problématique à l’égard du géant chinois

Outre le désastre environnemental occasionné, ces délocalisations ne sont pas sans conséquences sur l’avenir industriel des pays occidentaux comme sur l’équilibre géopolitique mondial actuel. C’est d’ailleurs l’objet de la deuxième partie du livre. Pour les différents experts du secteur interrogés par l’auteur, l’avantage acquis par la Chine sur la production des terres rares ne deviendra pas problématique : il l’est déjà. L’Empire du Milieu a entrepris une remontée de la filière qui lui confère une longueur d’avance sur toute la chaîne de valeur des métaux rares, y compris les produits technologiques finis à haute valeur ajoutée. La Chine maîtrise ainsi 80% du marché mondial des batteries lithium des voitures électriques (p. 193). Elle fabrique des aimants de terres rares qui équipent le F-35, fleuron de l’aviation américaine, faute de fournisseurs américains capables de de les produire (p. 227).

Des oxydes de terres rares. Source: Wikipédia

On tirera deux enseignements de cet ouvrage parfois alarmiste, mais qui a le mérite d’attirer le regard sur des débats trop longtemps occultés. Le premier et le principal est lié au sous-titre du livre : la face cachée de la transition énergétique et numérique. Les énergies renouvelables et autres “green tech” apportent des solutions au problème posé par le changement climatique ; elles n’ont en revanche rien du remède miracle. Que l’on soit clair : il ne s’agit en rien de plaider pour un statu quo qui laisserait fonctionner les centrales à charbon, sous prétexte que les éoliennes et les panneaux solaires ne sont pas vraiment des énergies “vertes”. La lutte contre le changement climatique passe par la réduction très rapide des émissions de CO2, lutte dans laquelle les énergies renouvelables jouent un rôle central. L’ouvrage de G. Pitron invite toutefois le lecteur à engager une réflexion plus large sur l’empreinte de l’homme sur son environnement et donc à débattre de la réduction de certaines formes de consommations, de sobriété, de décroissance. Le deuxième enseignement résonne avec les questionnements récents concernant la désindustrialisation et les intérêts stratégiques liés à certaines industries. Certes, l’interdépendance commerciale entre la Chine et les autres grandes puissances permet de douter de l’imminence d’une guerre des métaux rares. Toutefois, le livre de G. Pitron brise le mythe d’une Chine “usine du monde” qui subirait un retard technologique et met en garde contre les dangers d’un nationalisme des terres rares. Autant de réflexions qui arrivent lentement mais sûrement  à l’ordre du jour.

Annexe

  1. Rifkin, J. 2012. La troisième révolution industrielle. Les Liens qui Libèrent
  2. IRENA. 2019. Future of wind
  3. Flipo, F., Dobré, M., Michot, 2013. La face cachée du numérique. L’impact environnemental des nouvelles technologies. L’échappée.
  4. Cf. par exemple Le Monde. 2012. En Chine, les terres rares tuent les villages (https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2012/07/19/en-chine-les-terres-rares-tuent-des-villages_1735857_3216.html, consulté le 13/03/2021) ou Reporterre. 2021. En Mongolie, l’extraction des terres rares détruit l’environnement. (https://reporterre.net/En-Mongolie-l-extraction-de-terres, consulté le 13/03/2021)
Sujets environnementpollutionRevue de livreterre rare
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Thibault Briera

Thibault Briera

Agrégé de Sciences Economiques et Sociales

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