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Un accord historique pour réformer le marché du travail en Espagne
Ce jeudi 23 Décembre, le gouvernement espagnol, le patronat et les syndicats ont trouvé un accord pour réformer le marché du travail. Cette réforme avait été exigée par la Commission Européenne en échange des 140 milliards d’euros attribués à Madrid dans le cadre du méga plan de relance européen. Dans un communiqué, le ministère du Travail a ainsi affirmé qu’« il s’agit d’un accord historique en matière de relations sociales qui permet l’homologation du marché du travail espagnol avec le marché européen ».
Si le contenu de l’accord n’a pas encore été rendu public, il devrait permettre de réduire l’importante précarité sur le marché du travail espagnol. Avec un tiers de contrats temporaires, l’Espagne se place en tête du classement des pays européens.
En cause, la réforme du marché du travail de 2012 qui avait permis une forte baisse du taux de chômage, au prix d’une grande précarité. En effet, alors que le taux de chômage de l’Espagne atteignait des taux records en Europe suite à la crise financière de 2008, le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy avait donné un grand coup de flexibilité à son marché du travail, notamment en réduisant drastiquement les indemnités de licenciement et en autorisant les licenciements collectifs sans motif économique.
Alors que la coalition au pouvoir avait fait la promesse d’abroger partiellement la réforme de 2012, cette nouvelle réforme vise ainsi à revenir sur la précédente. En Mai dernier, la ministre de l’Économie, Nadia Calviño, assurait à ce sujet que l’objectif du gouvernement espagnol était de doter le pays « d’un nouveau droit du travail afin de pouvoir canaliser une croissance riche en emplois de qualité » d’ici le début de l’année 2022. Le contenu de l’accord, qui sera dévoilé ce mardi 28 Décembre lors du dernier Conseil des Ministres de l’année 2021, s’inscrit dans les grandes lignes énoncées par la ministre espagnole du Travail, Yolanda Díaz : lutter contre la précarité, réduire le chômage structurel, apporter de la souplesse aux entreprises et simplifier l’accès des jeunes à l’emploi.
Politique monétaire, marchés financiers
Problèmes de financements pour “l’Initiative européenne pour les paiements” (EPI)
Le European Payments Initiative (EPI) semble avoir du mal à se concrétiser. En début de semaine, la mise en œuvre du financement du projet butte notamment face à l’interrogation des banques espagnoles : craignant un coût trop élevé, plus important que prévu. Pour autant, bien qu’il y ait donc un désaccord sur le financement et la quote-part entre les banques actionnaires, ce n’est pas l’essence du projet qui déplait et pose problème.
C’est l’occasion de revenir sur un projet de paiement européen débuté depuis 2018. A cette époque, seize banques (dont six françaises) dessinent, en partenariat avec la Commission européenne et la BCE, les esquisses d’un projet d’offre de service menant à uniformiser les transactions au des pays de l’Union Européenne. En effet, à l’heure actuelle il n’est pas toujours facile d’obtenir des paiements en provenance de banque étrangère au sein même de l’UE. Cela limite sérieusement les paiements en provenance de certaines banques européennes.
Le projet est officiellement lancé en juillet 2020 : de grandes banques européennes s’associent pour mettre en œuvre une structure temporaire (Interim company). Le 26 novembre 2021, c’est un total de trente-et-une banques européennes qui formalise la transformation de l’Interim company en Target company (société permanente) : phase à laquelle le projet demeure, les actionnaires finalisant le processus de prise de décision (la hauteur des financements et les parts allouées en fonction de ceux-ci).
Le but de l’EPI est de permettre de réaliser une transaction sur internet dans tous les pays partenaires sans avoir à saisir de données personnelles et permettre des transactions entre particuliers instantanément à travers l’Europe grâce à l’adresse mail ou le numéro de téléphone du bénéficiaire.
Ce projet a suscité un vif intérêt de la part des banques européennes : on retrouve autour de la table aussi bien BNP Paribas, la banque polonaise PKO ou encore la banque finlandaise OP Financial Group. Il obtient aussi le soutien des autorités politiques : les ministres des finances de sept pays de la zone euro, dont la France et l’Allemagne, mais aussi la Commission européenne et la BCE appuient le projet.
En effet, au-delà d’un renforcement du système financier européen (en réduisant la fragmentation du marché des paiements), c’est aussi la souveraineté de l’Europe face aux géants américains et asiatiques du paiement en ligne qui se joue. Le but du projet EPI est de contester aussi bien Visa que Mastercard. Ceux-ci ont la mainmise sur le secteur du paiement : proposant des services par-delà les frontières, récoltant de nombreuses données, notamment en Europe. En outre, les réseaux chinois comme UnionPay, les solutions de paiements mobiles Apple Pay (américain) ou Samsung Pay (sud-coréen) voient l’Europe comme un appétissant marché, sans réel concurrent local. L’objectif de l’EPI est donc de proposer un service de paiement européen uniforme et sécurisé aux habitants de l’UE. Celui-ci sera soumis aux normes de sécurité européennes, celles-ci étant plus strictes quant à la gestion des données personnelles que celles des États-Unis ou de la Chine.· C’est donc une initiative très ambitieuse que les banques européennes cherchent à concrétiser, avec les encouragements des autorités politiques. Le problème rencontré en début de semaine n’est pas dramatique : des négociations et compromis ont toujours lieu. Pour autant des défections en cascade peuvent mener à un abandon général : le coût à assumer devenant trop important pour les banques restantes et les 1.5 milliards de fonds nécessaires à la concrétisation du projet étant impossible à trouver. Dans ce scénario, l’ambition d’un service de paiement européen uniforme devra retourner au stade des discussions théoriques et cryptiques entre spécialistes et chercheurs.