Ancien député et aujourd’hui entrepreneur, nous discutons avec Pierre Person de son rapport sur l’enjeu des cryptoactifs. Dans ce rapport, il dresse un état des lieux de l’évolution de l’écosystème depuis 2019, prône une démocratisation de son fonctionnement, décline les enjeux géostratégiques et géopolitiques, et formule des propositions afin d’accroître la compétitivité française et européenne dans ce secteur.
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Pierre Rousseaux – Votre rapport personnel intervient trois ans après le rapport parlementaire rédigé avec Eric Woerth. Durant cette période, il y a eu des évolutions significatives dans le domaine des cryptomonnaies, tant en ce qui concerne la part détenue par les Français que leur intérêt grandissant pour ces actifs. De plus, les monnaies numériques des banques centrales ont été au cœur des débats ces dernières années. Pourquoi avez-vous choisi d’écrire ce rapport et quelles sont les principales conclusions et recommandations que vous en tirez ?
PIERRE PERSON – L’écosystème des cryptomonnaies avait radicalement changé depuis le premier rapport. Les questions qui se posaient en 2017 et 2018, lorsque la commission des finances a décidé d’aborder le sujet et que j’ai accepté de le traiter avec Eric Woerth, étaient très différentes de celles d’aujourd’hui. La technologie avait évolué, les cas d’utilisation étaient plus clairs, mais les problématiques associées étaient encore floues et peu définies. En conséquence, au bout de 2 à 3 ans, j’ai estimé que le premier rapport était obsolète, bien que de nombreuses personnes y fassent référence. J’ai décidé de rédiger un second rapport, qui a nécessité 18 mois de travail et environ 200 à 250 auditions. J’ai cherché à ce que ce rapport ait une portée internationale, car les enjeux liés aux cryptomonnaies ne se limitent pas à la France. Malheureusement, au départ, la commission des finances avait principalement ciblé des intervenants français pour les auditions. Cette approche est compréhensible, car les parlementaires et les administrateurs de la commission des finances ne maîtrisent pas toujours bien l’anglais. Cependant, le secteur des cryptomonnaies est mondial, et les dynamiques qui le traversent touchent à de nombreux domaines, de la souveraineté à l’économie, en passant par la politique. Par conséquent, j’ai essayé de faire en sorte que ce second rapport soit davantage tourné vers l’international, en interrogeant un éventail plus large d’acteurs.
Quelles ont été les recommandations principales de votre rapport ?
Avant d’entrer dans les détails de certains points, je tiens à préciser que ce deuxième rapport comporte moins de recommandations pratiques et logistiques que le premier. Pourquoi ? Parce que le premier rapport visait à élargir ou à créer de nouveaux régimes de régulation. Dans ce deuxième rapport, nous étions à une étape différente, celle de la réflexion au niveau européen, y compris sur le vote du texte au niveau européen. Il y avait donc un transfert de compétences de la France vers l’Union européenne, ce qui a entraîné la mise en place de certains textes que j’avais envisagés en 2018-2019 et qui entreraient en vigueur dès que les taxes européennes seraient appliquées. En conséquence, certaines des réglementations que j’avais proposées en 2018-2019 sont devenues obsolètes. Ce rapport avait davantage une vocation pédagogique, pour deux raisons. Tout d’abord, en tant que décideur politique, j’étais quelque peu isolé dans le traitement de ces sujets, et compte tenu de leur complexité, j’ai jugé essentiel de fournir une version finale qui reflète ma compréhension actuelle du secteur et de ses impacts, même si elle demeure subjective. De plus, j’ai adopté une approche prospective pour le constat, puis j’ai tenté d’élaborer quelques propositions de nature plus générale que celles du premier rapport.