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Une approche macroéconomique du confinement face à l’épidémie de Covid-19

Face à la crise sanitaire mondiale, annonçant une future récession d’ampleur historique, une approche macroéconomique des épidémies permet de mieux comprendre les effets du confinement sur l’économie et sur la santé de la population.

parJérôme Pivard
11 mai 2020
dans Analyses, Monde, Sciences Eco
7 minutes de lecture
1
Une approche macroéconomique du confinement face à l’épidémie de Covid-19
Les gouvernements actuels sont confrontés à un arbitrage délicat, dont les deux choix extrêmes sont : adopter des mesures restrictives de confinement déprimant l’activité économique afin de ralentir la propagation du virus, ou bien essayer de maintenir l’activité économique au prix d’aggraver la létalité de l’épidémie. En s’appuyant sur les travaux de trois chercheurs appliqués aux Etats-Unis (1), il apparaît qu’il est non seulement plus moral, mais aussi économiquement optimal d’organiser un confinement généralisé en dépit des effets récessifs à court terme d’une telle politique.

Alors que les gouvernements du monde entier cherchent à contenir l’épidémie de coronavirus par tous les moyens, nombreux sont les chercheurs qui se sont tournés vers des modèles épidémiologiques pour essayer de prédire son évolution. 

Comme le soulignent Eichenbaum, Rebelo et Trabandt (1), ces modèles sont utiles mais présentent un défaut majeur : ils ne prennent pas en compte l’interaction entre décisions économiques et taux d’infection. Nos trois économistes étendent donc le modèle “SIR” (“susceptible, infected and recovered” , en français “modèles compartimentaux en épidémiologie”) de Kermack et McKendrick (1927) pour étudier cette interaction. 

Dans ce modèle, les probabilités de transition entre les différents états de santé sont exogènes ( i.e. d’origine extérieure aux mécanismes étudiés). Les chercheurs modifient le modèle en supposant que consommer ou travailler amène les gens à rentrer en contact les uns avec les autres, ce qui augmente donc les probabilités de propagation de l’épidémie.

Dans leur modèle, l’épidémie a des effets à la fois sur l’offre agrégée et sur la demande agrégée, et ce car les travailleurs sont exposés au virus, ce qui les incite à réduire leur offre de travail en réaction. L’effet de demande découle d’un mécanisme similaire appliqué aux consommateurs : ces derniers réduisent leur demande car ils sont exposés au virus.

C’est la conjonction de ces deux effets qui résulte en une importante récession (comme en témoignent les récentes publications sur le ralentissement du PIB dans les dernières projections, et ce qui fit dire  il y a quelques jours au ministre de l’Economie Bruno Le Maire (3) que la France allait sans doute connaître sa plus forte récession depuis 1945). 

Aux Etats-Unis, 16 millions de personnes ont perdu leur emploi ce dernier mois (5), et cette hausse du chômage soulève également des problèmes d’assurance pour les Américains, étant donné que celle-ci est souvent conditionnée à l’emploi ; il n’existe pas de couverture sociale universelle dans ce pays. Ainsi, une forte récession aura nécessairement un impact majeur sur la qualité de vie des plus précaires.

En se fondant sur le scénario retenu par Angela Merkel dans un discours au mois de mars (4), “60 à 70 % de la population” serait infectée en l’absence de vaccins et de traitements. En appliquant ce scénario aux Etats-Unis, il en résulterait un nombre de décès autour d’un million. Parallèlement, sans confinement généralisé, la consommation agrégée ne diminue que de 0.7% la première année de l’épidémie, et à long terme la population et le PIB réel décroissent chacun  de 0.3% du fait de la mortalité induite par l’épidémie.

Un aspect important du modèle est que l’impact des interactions économiques sur les probabilités de propagation/guérison modifie la dynamique de l’épidémie et son impact économique. Le modèle prenant en compte les effets du confinement sur l’activité économique suggère une récession plus forte mais une mortalité moindre : la consommation agrégée diminue en moyenne de près de 5% sur un an, alors que le pourcentage de la population infectée diminue à 54%, ce qui réduit le nombre de décès aux E-U à 880 000. 

La politique publique idéale dans ce contexte, comme l’écrivent les trois chercheurs :

“renforce la fraction de la population qui est immunisée, réduit la consommation quand les externalités d’infection sont fortes (i.e. quand la proportion d’infectés est élevée ), ce qui implique nécessairement la mise en place de mesures de confinement de plus en plus strictes tant que l’épidémie se propage, puis leur assouplissement progressif quand celle-ci ralentit”.

Eichenbaum, Rebelo et Trabandt

Par ailleurs, un autre phénomène conduit les agents à réduire encore davantage leurs activités économiques quand la mortalité augmente :  la crainte que le système de santé soit débordé.  Ceci accroît encore l’ampleur de la récession. 

Les enseignements de leur modèle le plus général sont les suivants : Sans confinement, la consommation moyenne chute de 7% la première année, alors que le déclin s’élève à 22% avec confinement. Mais cette récession, combinée à des mesures de confinement optimales, est compensée par une baisse du pic de taux d’infection de 4,7 à 2,5% de la population initiale, et du taux de mortalité de 0,4 à 0,26%, ce qui revient aux Etats-Unis à sauver environ un demi-million de personnes. Ces chiffres correspondent au pire scénario, à savoir celui selon lequel les vaccins et traitements n’arrivent jamais. Par rapport à une situation de “laisser-faire”, les mesures de confinement permettent ainsi de réaliser un gain pour la collectivité chiffré aux alentours du quart du PIB des Etats-Unis, en se basant sur le prix de la vie fixé par l’agence américaine de protection de l’environnement comme le souligne Emmanuel Combe (2).

De plus, selon les chercheurs, retarder le confinement ou déconfiner prématurément conduit à une reprise économique dans un premier temps, mais ensuite aussi à une nouvelle augmentation du taux d’infection, qui accroît finalement la récession à long terme ! D’où la nécessité de ne pas relâcher les efforts trop tôt…

Enfin, les chercheurs se posent une dernière question : si le confinement n’était plus appliqué à tout le monde de manière indifférenciée, en particulier si le gouvernement pouvait “choisir” la consommation et le nombre d’heures de travail des personnes en fonction qu’elles sont exposées, infectées ou guéries, est-ce qu’il ferait mieux ? C’est ce qu’ils appellent un “confinement intelligent”, régime qui durerait environ un an et demi après le début de l’épidémie, sous lequel les gens infectés ne travaillent pas, et les personnes exposées réduisent leur travail mais sans complètement arrêter. Les chercheurs obtiennent que ce régime engendrerait une atténuation de la récession et une baisse du nombre de décès par rapport à un confinement “simple”. 

Par conséquent, cette étude suggère que consommer et travailler moins atténue la gravité de l’épidémie. L’équilibre compétitif n’est pas optimal socialement car les personnes infectées ne prennent pas totalement en compte l’effet de leurs décisions économiques sur la propagation du virus avant de choisir de produire ou pas, et de consommer ou pas. 

Les politiques de confinement “simple” réduisant les heures de travail et la consommation, et donc les interactions économiques entre agents, accélèrent la récession mais accroissent le bien-être en réduisant le nombre de décès, alors qu’un “confinement intelligent” conditionnant le confinement à la santé des personnes fait encore mieux. Mais ceci pose des problèmes de révélation d’une information cachée pour l’Etat, qui ne connaît pas à priori l’état de santé de tous les citoyens… 

Par rapport à une situation de “laisser-faire”, les mesures de confinement permettent de réaliser un gain pour la collectivité chiffré aux alentours du quart du PIB des Etats-Unis. En résumé, comme l’écrit Emmanuel Combe (2), la principale leçon de cet article est la suivante : “Lutter contre la diffusion du virus par un confinement optimal n’est pas seulement une question morale. Cela semble aussi un bon calcul économique.”

Néanmoins, cette question du “confinement optimal” soulève des enjeux pratiques en ce qui concerne le fameux “déconfinement” – qui devrait débuter le 11 mai en France même si de grandes incertitudes subsistent -, enjeux  abordés notamment par Gossner et Gollier dans un article récent (6). Ces derniers soulignent notamment l’importance capitale de parvenir à tester la plus grande partie possible de la population avant de reprendre les activités économiques, étant donné que de nombreux individus sont susceptibles d’être porteurs asymptomatiques du virus et qu’il ne sera pas possible d’atteindre ce que l’on appelle “l’immunité collective” à court terme (cela impliquerait qu’une majeure partie de la population ait déjà été en contact avec le virus). Une solution possible selon eux serait d’effectuer des “tests groupés”. En France, la réouverture des établissements scolaires et des crèches constituera à cet égard le premier test majeur dans cet exercice périlleux.

Sources :

(1) The Macroeconomics of Epidemics, Eichenbaum, Rebelo et Trabandt

(2) “Lutte contre le Covid-19 : une analyse coût/bénéfice” (L’Opinion), Article d’Emmanuel Combe

(3) https://www.capital.fr/economie-politique/bruno-le-maire-annonce-la-probable-plus-forte-recession-depuis-1945-pour-la-france-1366821

(4) https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/la-sombre-prevision-de-merkel-60-a-70-de-la-population-pourrait-etre-infectee_2120618.html

(5) https://www.lci.fr/international/video-coronavirus-16-millions-de-chomeurs-en-un-mois-aux-etats-unis-2150828.html

(6) https://www.tse-fr.eu/temporary-coronavirus-testing-fix-use-each-kit-50-people-time

Sujets coronavirusMacroéconomie
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Jérôme Pivard

Jérôme Pivard

Membre de l'équipe rédaction. Etudiant en deuxième année à l'ENSAE (Ecole Nationale de la Statistique et de l'Administration Economique), je me destine à la recherche en économie. Je m'intéresse en particulier à l'économie de l'environnement, thème sur lequel porte une majeure partie de mes articles.

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